Combien de fois par semaine pouvons-nous entendre une personne répondre « c’est évident » sans qu’elle n’ait pris réellement le temps de penser si c’est « si évident que cela » pour tout le monde? Combien de fois l’avons-nous fait nous-mêmes?D’ailleurs, que veut dire ce « c’est évident »? Que tout était par avance su? Que l’objet de la conversation sautait aux yeux de tous?

Au fil des nombreuses expressions telles être en évidence, se mettre en évidenceou, encore, se rendre à l’évidence force est de constater que l’évidence peut être servie à plusieurs sauces.  De toute évidence, l’évidence est toute, sauf évidente.

C’est l’été, soyons plus légers mais tentons néanmoins d’y voir un peu plus clair.

Le mot évidence nous arrive tout droit de la langue de Cicéron et qui signifiait, à l’origine, qui se voit de loin ou, pour étendre un peu la signification, ce qui s’impose clairement à l’esprit. Remarquons que dans ces deux exemples, pour voir de loin ou pour s’imposer à l’esprit il faut une forme d’attention, il faut une certaine durée, même si ce n’est que la durée de lever les yeux pour voir de loin ou de prendre le temps qu’il faut pour qu’une idée s’impose à l’esprit. L’évidence, qu’on croît instantanée est, au fond, une interprétation rapide à-travers le filtre de nos connaissances : rien ne peut être évident à qui ne connaît rien. Le préalable à l’évidence, repose sur la nécessaire connaissance du monde qui nous entoure.

Même si la connaissance globale, en soi, progresse constamment, il me semble parfois que la connaissance du monde par les individus, elle, recule. Le pire ennemi de la connaissance étant l’instantanéité qui fait que la connaissance recule à coups de tweets ou de post qui, trop fréquemment présentent des faussetés et des idées reçues. Sur les médias sociaux, l’évidence « instantanée » tient plus du réflexe que de la réflexion.

Alors, que faire lorsque les algorithmes qui trient selon nos habitudes et nos préférences finissent par nous présenter des informations qui sont parfois fausses, souvent incomplètes, lancées au visage à un rythme effréné? Éteindre les écrans et ne plus rien y lire? Non. On ne saurait conseiller de ne pas lire.

Cependant, il faut comprendre qu’il est sage de s’abreuver à plusieurs sources d’informations. C’est d’ailleurs cette variété qui permettra au lecteur curieux et critique de mieux comprendre le monde qui l’entoure et, à terme ou au fil du cumul des connaissances d’affirmer « c’est évident ».

L’évidence ne peut se constituer que par la somme et l’interprétation des connaissances acquises. C’est peut-être là la seule évidence…

Poésie? Astronomie? Roman? Philosophie? BD?

Profitez des vacances, élargissez votre horizon, faites une lecture que vous ne feriez pas habituellement.

Lire, c’est entendre avec les yeux
– Pierre Léger